Sévice militaire

Publié le par Louise

Je vous propose de lire un petit papier écrit par un tout jeune homme au sortir de son service militaire.

 

J’étais malade, j’avais le cancer du cerveau parce qu’on ne m’avait jamais rien dit. Etre un homme, c’était savoir tuer les autres, bien sûr que ce n’était pas du vrai, mais on portait un fusil, on avait quand même la peur qu’un jour il faille s’en servir comme tant d’autres ont fait, c’est à dire s’en servir pour assassiner des hommes, des êtres, enfin, la folie suprême de l’homme.

 

« L’armée, ça vous fait un homme » ; qui n’a jamais entendu ça un jour ? Et bien, pour moi, un homme c’est celui qui respecte la vie et n’a pas besoin d’un fusil pour se sentir fort.

L’homme qui marche au pas n’est pas un homme – un élément dans une immense machine-  une machine qui aboutit toujours à lui exploiter sa sueur et puis son sang. J’étais devenu cette mécanique, cet homme comme on dit, j’étais même parmi l’élite de ces machines puisque parachutiste et commando, c’est à dire la machine dans son plus haut perfectionnement, pour une tuerie. Puis, petit à petit, j’ai ouvert les yeux, j’ai regardé le monde et ses misères et j’ai vu qu’il y avait ces hommes-machines. C’est là que l’on souffre le plus. Mon cerveau, petit à petit, s’est nettoyé de toutes ces intoxications qu’il avait subies dans une société où tout vous contraint à vous conduire comme une bête si l’on n’essaye pas de se poser des questions.

Quelques individus sinistres et hypocrites conduisent des millions d’autres où ils veulent et quand ils veulent. Si, par hasard, un sort du rang, il est considéré comme indésirable et même un peu fou. Moi, je regrette qu’il n’y ait pas plus de ceux-là  dans tous les pays du monde.

Je ne réalisais pas complètement qu’en tirant sur des cartons, on m’apprenait à tirer sur des gens. J’étais un soldat d’élite. Heureusement que mon cerveau a su résister à ce cancer qui mène invariablement, tôt ou tard, à se salir les mains dans le sang d’innocents pour quelques politiciens soudoyés par quelques industriel foireux.

 

Non je ne regrette pas ce que j’ai fait, puisque je parle de choses que j’ai vécues d’expérience, que j’ai subies dans cette école de la stupidité humaine, école du fascisme et de la folie de quelques hommes. Quiconque lira ceci devra savoir que c’est écrit par un homme qui a pris conscience de la vie, et même s’il n’a pas de médailles et de blessures à exhiber, il est capable de dire merde à ces hommes-machines qui marchent au pas cadencé.

Je suis heureuse que ce jeune homme soit mon père.

Publié dans mctproduction

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A
Et pour ceux qui oseraient prendre comme excuse qu'on ne trouve pas le monde partout "dans le monde" (jeux de mots trop facile je sais, mais aussi tropmarrant lol ) il y a depuis hier l'article en ligne :<br /> <br /> @import url(http://medias.lemonde.fr/mmpub/css/blog.css);<br /> Léon Weil, une vie volée à la mortLE MONDE | 19.04.06<br /> © <br />
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L
je conseille à tous ceux qui prétendent encore que je dis n'importe quoi à ce sujet de lire le portrait de Léon Weil, publié dans le Monde d'aujourd'hui, c'est un ancien combattant de la 1ere guerre ET de la 2ème. ce qu'il dit est édifiant. et lui, il sait aussi de quoi il parle.
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L
tu sais Olivier, j'ai déjà demandé à JM de lire cette chanson, il n'a pas réagi... je ne suis pas sûre que lui mettre les paroles lui soit utile...
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O
Monsieur le PrésidentJe vous fais une lettreQue vous lirez peut-êtreSi vous avez le tempsJe viens de recevoirMes papiers militairesPour partir à la guerreAvant mercredi soirMonsieur le PrésidentJe ne veux pas la faireJe ne suis pas sur terrePour tuer des pauvres gensC'est pas pour vous fâcherIl faut que je vous diseMa décision est priseJe m'en vais déserterDepuis que je suis néJ'ai vu mourir mon pèreJ'ai vu partir mes frèresEt pleurer mes enfantsMa mère a tant souffertElle est dedans sa tombeEt se moque des bombesEt se moque des versQuand j'étais prisonnierOn m'a volé ma femmeOn m'a volé mon âmeEt tout mon cher passéDemain de bon matinJe fermerai ma porteAu nez des années mortesJ'irai sur les cheminsJe mendierai ma vieSur les routes de FranceDe Bretagne en ProvenceEt je dirai aux gens:Refusez d'obéirRefusez de la faireN'allez pas à la guerreRefusez de partirS'il faut donner son sangAllez donner le vôtreVous êtes bon apôtreMonsieur le PrésidentSi vous me poursuivezPrévenez vos gendarmesQue je n'aurai pas d'armesEt qu'ils pourront tirer<br /> Boris Vian<br /> <br /> Pour Jean Michel et les autres !
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J
Je viens enfin de terminer de lire cet article mais j'ai du mal avec les propos de ce Mr Jean Michel. Vous le connaissez vraiment ou ne serait ce pas plutot un jeune garcon?<br /> Ce qui est certain , c'est que je suis d'accord avec les propos de Louise car moi j'ai fait mon service militaire et encore plus d'accord avec ce qu'a ecrit Olivier avant moi. Si les gens qu'il cite ont repondu cela  (mon grand oncle tient les meme propos) , je pense qu'il doit y avoir une raison.<br /> Mais ce qui est vraiment grave , c'est que dechiffrer ce jeune garcon m'a donne un mal de tete affreux sinon oui si on prend lettre par lettre ca peut etre lisible mais il faut en vouloir.
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